Une nouvelle étude menée par Caribou en partenariat avec la Fondation Mastercard révèle une transformation silencieuse mais puissante de l’agriculture en Afrique de l’Ouest, portée par les jeunes agriculteurs ivoiriens. Ces derniers détournent les réseaux sociaux de leur usage traditionnel pour en faire des outils de croissance agricole, d’apprentissage collaboratif et d’inclusion économique.

Dans un contexte où les services agricoles publics peinent à atteindre les zones rurales, les jeunes agriculteurs utilisent ces plateformes pour combler les lacunes du système formel en les transformant en marchés virtuels, des vitrines commerciales, des centres de formation et des outils de branding. Par exemple, WhatsApp est utilisée pour partager les prix du marché et alerter contre les fraudes, Facebook comme vitrine pour les produits agricoles et le renforcement de la relation client, TikTok comme plateforme de formation avec des vidéos pédagogiques adaptées aux réalités locales et Instagram comme un outil de présentation professionnelle pour séduire les marchés urbains et internationaux.

Une innovation portée par les jeunes et les femmes

L’étude met en lumière des figures inspirantes comme Josiane Asso Lobar, surnommée la « Reine du riz », qui a intégré toute la chaîne de valeur du riz et utilise les réseaux sociaux pour promouvoir son activité. Fatou Dosso, à Bouaké, transforme l’anacarde en produits innovants grâce à des tutoriels en ligne. Maryse Carole Yoboué, à Yamoussoukro, finance des producteurs et rêve d’industrialiser la transformation du riz.

Les femmes rurales, souvent exclues du numérique, s’organisent en clusters comme les « DigiQueen » au Bénin, mutualisant leurs ressources pour accéder aux outils numériques. En Côte d’Ivoire, des coopératives féminines utilisent les notes vocales WhatsApp en langues locales pour inclure les membres peu alphabétisées.

Un potentiel encore sous-exploité

Malgré l’ampleur de cette innovation, les politiques numériques de l’UEMOA restent centrées sur les entreprises formelles et les plateformes spécialisées, ignorant les usages informels mais massifs des réseaux sociaux. L’étude appelle à :

  • Reconnaître et soutenir les pratiques numériques existantes.
  • Former via les plateformes déjà utilisées par les agriculteurs.
  • Investir dans la connectivité rurale et les modèles créés par les agripreneurs eux-mêmes.
  • Activer des fonctionnalités de monétisation sur les réseaux sociaux pour soutenir les agriculteurs.

Des chiffres révélateurs

  • 7 millions d’utilisateurs de réseaux sociaux en Côte d’Ivoire, dont près de 25 % à des fins agricoles.
  • Moins de 25 % des agriculteurs ont accès aux services publics de vulgarisation.
  • Seulement 13,8 % des adultes ivoiriens ont un compte bancaire.
  • Les femmes sont 19 % moins susceptibles d’utiliser l’internet mobile.

Vers une agriculture sociale et inclusive

Charlene Migwe, directrice de programme chez Caribou, résume : « L’agriculture sociale est portée par les jeunes et les femmes qui réinventent un avenir agricole communautaire, numérique et plein de potentiel. » Eunice Muthengi, de la Fondation Mastercard, ajoute : «Imaginez ce qu’elles pourraient accomplir avec les bons outils, la bonne formation et le bon soutien.»

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